Ablis, le 13 novembre 2012
Madame Marisol TOURAINE
Ministre des Affaires sociales et de la Santé ; 14, avenue Duquesne ; 75350 PARIS 07 SP Objet
Objet : Lettre ouverte en vue de la mise en oeuvre urgente de mesures concernant la reconnaissance, la prise en charge et la prĂ©vention de l’hypersensibilitĂ© Ă©lectromagnĂ©tique
Madame la Ministre,
De plus en plus de personnes souffrent aujourd’hui de l’exposition aux champs Ă©lectromagnĂ©tiques, qu’ils soient de radiofrĂ©quences ou de basses frĂ©quences (50Hz). La multiplication des sources et des frĂ©quences utilisĂ©es explique sans doute cette croissance. Pour certains, devenus hypersensibles, l’intolĂ©rance Ă des expositions de très faible niveau et dans de nombreuses gammes de frĂ©quences dĂ©clenche des symptĂ´mes sĂ©vères et invalidants. Les courriers des malades adressĂ©s Ă la DGS dans le cadre de notre appel Ă tĂ©moignages initiĂ© au printemps 2012 en tĂ©moignent.
A l’heure actuelle, l’absence de preuve scientifique Ă©tablie concernant le lien de causalitĂ© entre exposition et hypersensibilitĂ©, rapportĂ© en 2009 par le rapport de l’AFFSET, conduit Ă une absence de gestion des risques et donc de prĂ©vention de l’apparition de nouveaux cas, en contradiction avec le principe de prĂ©caution.
La dĂ©cision de prise en charge, lors de la table ronde radiofrĂ©quences et santĂ© en 2009, s’est traduite par le financement par l’AP-HP d’une Ă©tude dite Etude Cochin. Nous avons dĂ©noncĂ©, au moment de son lancement en fĂ©vrier 2012, soit 3 ans après son annonce, les orientations partisanes de cette Ă©tude, l’opacitĂ© de sa gouvernance ainsi que le secret gardĂ© sur son protocole dont nous ne disposons toujours pas malgrĂ© nos nombreuses demandes. Les premiers tĂ©moignages qui nous parviennent de personnes souhaitant ĂŞtre incluses Ă l’Ă©tude ou ayant consultĂ© les services impliquĂ©s, rapportent parfois des manquements graves Ă la dĂ©ontologie mĂ©dicale. En outre, nous ne pouvons considĂ©rer qu’il s’agit lĂ d’une prise en charge des personnes hypersensibilisĂ©es car il s’agit d’une recherche d’Ă©valuation sur près de 4 ans, qui admet ne pas pouvoir prendre en charge les cas les plus graves et n’incluant que deux personnes par an et par centres en moyenne.
Enfin, l’expĂ©rimentation de centres inter-Ă©tablissements de soins, prĂ©vue dans le cadre du PNSE2, a Ă©tĂ© confiĂ©e par le Ministère de la SantĂ© Ă la SFSE (SociĂ©tĂ© Française de SantĂ©-Environnement) mais ne fait l’objet d’aucune information au niveau des comitĂ©s de suivi du PNSE2.
A l’heure actuelle, nous constatons que :
concernant l’Ă©valuation du risque, l’ANSES a jugĂ© utile d’installer un groupe de travail permanent
pour mettre Ă jour l’expertise relative aux radiofrĂ©quences. Dans ce cadre, un travail spĂ©cifique sera
consacrĂ© Ă l’hypersensibilitĂ© Ă©lectromagnĂ©tique en 2013.
Il est clair que l’absence de preuve Ă ce jour relève essentiellement de la difficultĂ© Ă cerner
scientifiquement ce phĂ©nomène complexe. C’est pourquoi nous nous sommes fĂ©licitĂ©s qu’en matière
de dĂ©veloppement de la recherche, l’ANSES ait orientĂ© son Appel Ă Projet de Recherche 2012 vers
des approches novatrices de l’hypersensibilitĂ©. Aucune Ă©tude n’a malheureusement pu ĂŞtre retenue
cette annĂ©e. Aussi, un nouveau dispositif, pilotĂ© directement par l’ANSES, a Ă©tĂ© imaginĂ© et deux
projets exploratoires sont en cours de définition pour pallier au manque de connaissance patent sur
ce sujet et pour l’aborder selon des orientations renouvelĂ©es.
Cependant, la recherche s’inscrivant nécessairement dans le temps long, il ne serait pas
responsable d’attendre de connaĂ®tre tous les mĂ©canismes impliquĂ©s pour prendre des mesures de
prĂ©caution et de rĂ©pondre aux situations d’urgence dans lesquelles se trouvent de nombreuses
personnes atteintes.
concernant la veille sanitaire, l’INVS que nous avons rĂ©cemment rencontrĂ©e, s’est dĂ©clarĂ©e dĂ©munie
d’outils mĂ©thodologiques quant aux signaux faibles environnementaux, dont on peut considĂ©rer que
les personnes dĂ©veloppant une hypersensibilitĂ© font partie. Dans un contexte d’incertitude, les
signaux d’un risque Ă©tant aujourd’hui indĂ©niables, nous ne pouvons Ă©videmment pas nous satisfaire
de l’absence actuelle d’outils d’évaluation des impacts sanitaires et donc de mise en place de
processus de vigilance. Cette lacune compromet gravement la possibilité de faire progresser la
connaissance sur la prĂ©valence de l’hypersensibilitĂ©, sur les conditions de son apparition et de son
dĂ©veloppement. Aujourd’hui il est ainsi impossible d’Ă©valuer correctement le risque et, a fortiori, de
dimensionner les mesures de gestion qui s’imposent.
concernant la prise en charge, on sait que dans le cas des hypersensibilités environnementales, une
prise en charge adaptĂ©e et prĂ©coce contribuerait Ă limiter l’errance mĂ©dicale, Ă rĂ©duire les risques
d’atteintes irrĂ©versibles Ă l’Ă©tat de santĂ© des personnes et Ă favoriser le maintien ou le retour Ă une
vie sociale. Ces éléments sont très clairement ressortis des interventions lors de la journée
scientifique organisĂ©e par l’ANSES le 25 septembre dernier qui ont Ă©voquĂ© des projets de soins
individualisés, négocié avec le patient, impliquant les différents acteurs, médecins du travail,
travailleurs sociaux, médecins généralistes et spécialistes. Cette prise en charge devrait permettre
de moduler une Ă©viction, plus ou moins drastique selon l’Ă©tat de la personne, avec une restauration
des capacitĂ©s de l’organisme Ă faire face aux agressions environnementales telle que prĂ©conisĂ© par
l’Association mĂ©dicale Autrichienne.
concernant les droits des personnes, l’absence de reconnaissance de cette maladie
environnementale Ă©mergente et de la situation de handicap liĂ© Ă l’omniprĂ©sence de la pollution
électromagnétique, génère des ruptures sociale et professionnelle, et des situations confinant à la
maltraitance voire Ă la mise en danger. L’exemple le plus frappant en est l’impossibilitĂ© pour une
personne victime d’Ă©lectrohypersensibilitĂ©, d’accĂ©der aux soins hospitaliers eu Ă©gard au dĂ©ploiement
de technologies sans fil dans les centres de soins.
C’est pourquoi, nos associations ont dĂ©cidĂ© de porter une plate-forme de revendications spĂ©cifiques qui permette d’apporter une rĂ©ponse pour gĂ©rer les situations d’urgence, de trouver les solutions administratives adaptĂ©es et garantissant l’insertion et l’accès aux services publics, d’éviter que l’incidence de cette maladie environnementale Ă©mergente n’augmente et de dĂ©velopper la connaissance Ă ce sujet.
Cette plate-forme complète les exigences gĂ©nĂ©rales que portent les associations signataires pour la protection de la santĂ© publique en vue d’une loi : rĂ©duction des expositions, application du principe ALARA, rĂ©glementation des sources proches… nĂ©cessaires aussi bien pour la protection de la population que pour l’amĂ©lioration de la qualitĂ© de vie des personnes hypersensibles au quotidien. Ces plates-formes ne sauraient remplacer le dĂ©bat public nĂ©cessaire pour tirer toutes les consĂ©quences pour la sociĂ©tĂ© des impacts de cette pollution gĂ©nĂ©ralisĂ©e, notamment en terme de justice environnementale et de coĂ »t humain et financier.
Nous avons l’honneur de les porter Ă votre connaissance et sollicitons une entrevue pour pouvoir Ă©changer sur leur mise en oeuvre.
Dans cette attente, nous vous assurons de notre parfaite considération. Pour les organisations signataires
Manuel HERVOUET et Sophie PELLETIER
Collectif des Electrosensibles de France
Boite 64 - 206 quai de Valmy - 75010 Paris
Tél : 01 42 47 81 54 - Fax : 01 42 47 01 65 - Contactez-nous
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